Dîner-causerie : la Guyane française face au problème de l’immigration.

M Radjou

Dîner-causerie : la Guyane française face au problème de l’immigration.

Ce dîner-causerie a eu lieu le 13 juin 2007.
Dans sa brillante intervention, M . Radjou expose que la richesse relative de la Guyane dans son environnement géographique, conjuguée à ses institutions démocratiques et à son système de protection sociale, constitue le principal facteur d’attractivité de l’immigration. Les immigrés viennent en général pour rechercher des sources de revenus ou des espaces de liberté. Mais, de par sa nature, son ampleur et ses dérives, l’immigration déséquilibre la société guyanaise et est, maintenant, perçue comme une menace de destruction de la société guyanaise.

 

L’immigration n’est pas exclusive à la Guyane, c’est une réalité quotidienne de la mondialisation qui touche surtout les sociétés démocratiques. Mais joue-t-elle toujours un rôle positif ?

En 1999, selon le recensement, la population officielle était de 156.790 hab. dont 27% étaient des immigrés, avec   :
• une grande diversité ethnique
• les plus nombreux, Surinamais, Haïtiens et Brésiliens, représentaient les trois-quarts.
• 12% avaient acquis la nationalité française.
• les femmes étaient devenues les plus nombreuses.
• les jeunes étaient moins bien représentés

Aujourd’hui, la population officielle est estimée à 210.000 hab. avec un taux de croissance de 3,8% et les immigrés représentent 30% (+60.000). Or, cette population évolue à un rythme plus élevé que la population globale (4% contre 3,8%).

Aussi, la population réelle demeure une inconnue. Selon l’administration, les clandestins seraient entre 3.000 et 6.000, une estimation qui n’est pas compatible avec les 9 reconduites à la frontière en 2006. Pour d’autres ils seraient plus de 40.000. Ils vivent d’expédients et leurs revenus échappent à tout contrôle

La Guyane a connu plusieurs vagues récentes d’immigration :

• A partir de 1962, le CSG et les grands chantiers attirent la main d’œuvre.
• Après 1975, suite au regroupement familial, à l’immigration de main d’œuvre succède l’immigration familiale.
• 1982 - 1992 :  on assiste à un afflux des réfugiés
• Depuis, c’est surtout une immigration clandestine et de pillage, vécue comme une agression, d’autant qu’elle est liée à des formes d’insécurité.

Aujourd’hui, notre territoire est attractif car il apparaît comme un espace de prospérité et de liberté d’un accès relativement facile et sans grand risque.

En Guyane, 51% des enfants vivent au sein d’une famille immigrée, 80% des immigrés vivent au sein d’une famille et 50% des 63.100 personnes vivant dans une des 15.600 familles immigrées ne sont pas des immigrés elles-mêmes.

Il est vrai qu’une issue à la clandestinité et à l’insertion sociale pour les immigrées est (pour ne pas être expulsées) de faire des enfants ou de se faire épouser par des Français.

Pour autant, l’immigration ne participe pas au renforcement de la cohésion sociale.

Le niveau scolaire des immigrés est faible, pour les hommes comme pour les femmes, (80% n’ont aucun diplôme contre 50% ) et leur taux de scolarisation pour les moins de 25 ans est de 53,7% contre 64,5%. Or, qu’il soit en situation régulière ou non, l’immigré a les mêmes droits d’accès à l’école et au système de santé que les Français.

Aussi, l’immigration, de par sa nature, participe à notre appauvrissement intellectuel.

Sur 42.200 résidences principales, 39,6% sont occupées par les ménages d’immigrés et les immigrés sont aussi souvent propriétaires que l’ensemble des ménages.
Sur 43.443 actifs occupés, un quart sont des immigrés et, pour le chômage, ils sont plus de la moitié. On les retrouve également avec des proportions similaires à la CAF, au RMI….

Par contre les immigrés occupent une large place dans l’économie informelle, notamment dans le travail illégal, dont on estime que ce secteur est au moins aussi important que l’économie licite.

Tout en pesant assez lourdement sur les coûts sociaux, les immigrés ne participent en contrepartie que peu à l’effort de solidarité (fiscalité,…) et, de plus, ils sont à l’origine d’importantes fuites monétaires.

Au total, M. Radjou estime que sous sa forme et dans son contexte actuels, l’immigration contribue d’avantage à l’appauvrissement de la Guyane qu’à son enrichissement.

Le débat qui a suivi a été un des plus animés de nos dîners-causeries. Les différents points de l’exposé ont donné lieu à des échanges nourris. Quelques contestations se sont élevées sur certaines des appréciations du conférencier, mais d’une manière générale les intervenants ont été en phase avec son analyse, estimant qu’elle résulte de l’acuité du problème que constitue pour la Guyane une immigration jugée incontrôlée et excessive. Le respect de l’état de droit a été évoqué comme un des remèdes, mais ans sous-estimer la difficulté que rencontre sa mise en œuvre.